Le CHANT GREGORIEN plonge ses racines
dans l'évangélisation de l'Occident aux premiers siècles
de notre ère.
Si l'attribution de sa paternité au pape saint Grégoire (+ 610)
est aujourd'hui pure légende, il n'en reste pas moins que Rome demeura
un lieu vivant de composition aux Ve-VIesiècles.
Mais autant de régions, autant de répertoires différents.
Pour exemple, Milan, Bénévent (Italie du Sud), l'Espagne et la
Gaule...
La mémoire assure le transmission des mélodies. C'est dans ce
contexte d'oralité qu'au VIIIe siècle se produit un rapprochement
entre le royaume franc (Pépin et Charlemagne) et Rome (pape Etienne II).
L'empereur pense que l'adoption de la liturgie aidera à résoudre
des difficultés politiques et assurera, par ailleurs, l'unité
recherché du royaume.
Il s'agit d'une adaptation et non d'un remplacement radical d'un répertoire
par un autre. C'est donc un "métissage", une "hybridation" qui sera à
l'origine du chant dit grégorien. Il faudrait peut-être
nuancer, mais peu à peu la tradition orale laissera place à une
tradition de l'écrit. En effet, l'invention d'un procédé
d'écriture va révolutionner les traditions musicales! On pourra
alors écrire le rythme des notes sans en préciser les intervalles...
Ce travail manuscrit se fait principalement entre Seine et Rhin. C'est un progrès,
mais aussi la source d'une décadence. La liberté du rythme verbal
se trouve peu à peu containte à disparaître sous la pression
des théoriciens. Les notes vont se poser sur des lignes, la polyphonie
fait son apparition.
Avec des livres, le rôle de la mémoire s'estompe. A la fin du moyen-âge,
la décadence est complète, tant dans l'édition des livres
que dans l'exécution chorale. S'il y a eu très tôt un souci
de la part des autorités ecclésiastiques pour un retour aux sources
et à "l'âge d'or" du grégorien, cette entreprise restera
vaine. Il faut attendre le XIXe siècle et les travaux de recherches,
menés principalement par l'atelier paléographique de Solesmes,
pour qu'une redécouverte et une véritable restauration soient
menées à bien. Certains noms peuvent être cités,
tels Dom Guéranger, Dom Pothier, Dom Mosquereau, Dom Cardine, Dom Claire...
Des moines, des chercheurs d'hier et d'aujourd'hui à qui l'on doit cette
nouvelle naissance. Concrètement, nos livres, Antiphonale monastique
et Graduale Romanum sont le résultat visible de ce long et beau
travail bénédictin.
Cette restauration ne trouvera tout son éclat et un certain achèvement
que par la voix de ceux qui la pratiquent de manière vivante et spirituelle.
Ce patrimoine culturel, musical et spirituel est déposé sur nos
lèvres, comme un trésor pour quenous lui donnions vie et sachions
le transmettre.